Le bonheur

 

 

Etymologiquement, le bonheur est ce qui est de bon augure, c’est la chance, la bonne rencontre. Avoir du bonheur dans sa vie, dans ses affaires, signifie rencontrer des circonstances extérieures favorables. C’est un peu comme si un papillon facétieux se posait sur une épaule plutôt qu’une autre et avait fait en sorte que les circonstances soient dans la meilleure configuration possible.

 

Vu comme cela, le bonheur semble hasardeux et pourtant aujourd’hui, combien d’articles de presse, de livres nous proposent des recettes pour être heureux. C’est que tous nous cherchons à savoir comment faire pour être heureux. Nous voulons l’être de toutes nos forces. Nous voulons connaître cet état qui dure. Comment peut-on vouloir ce qui semble relever du pur hasard, de la pure gratuité ? Comment peut-on installer dans la durée ce qui semble relever du pur instant ?

 

 

1 – Approche générale

 

Quelques réflexions sur la notion de bonheur : idée de quelque chose de durable, de quelque chose qui ne dépend pas de notre volonté, d’un bien-être total, d’une recherche essentielle pour l’homme. Citation de Blaise Pascal : "tout le monde cherche d'être heureux et cela sans exception".

 

D’où une définition possible mais vague du bonheur : « état de complète satisfaction qui remplirait toute la conscience ».

 

Cette approche générale du bonheur implique des conditions matérielles minimales (la notion de bonheur est très étrangère à une personne qui dort dans la rue chaque soir), des conditions biologiques correctes : comment en effet être heureux dans la maladie ? des conditions affectives acceptables (amitié, amour).

 

Différences entre bonheur et joie 

 

La joie est une émotion éphémère, parfois fréquente, et peut être violente. Le bonheur est plutôt un sentiment durable, rare et nous permet d'atteindra la paix, la sérénité, l'ataraxie.

 

Il est impossible de définir correctement le bonheur

 

« Le bonheur est un idéal non de la raison, mais de l’imagination. »

(Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs).

 

Nous désirons tous être heureux et celui qui nous dirait qu’il recherche en toute conscience le malheur serait immédiatement suspect. Cependant, si on nous demande de définir en quoi consiste exactement le bonheur, nous voilà bien dans l’embarras.  Nous pouvons bien donner quelques caractéristiques (être riche par exemple), mais nous nous rendons rapidement compte qu’aucune de ces conditions n’est suffisante. Nous voudrions tout à la fois. Le bonheur résiderait dans la satisfaction de tous les désirs tant en intensité qu’en durée. Il serait une entreprise de totalisation. Impossible d’établir une liste exhaustive et définitive des éléments qui feraient de nous des êtres heureux. Nous pouvons le faire sur le moment si quelque chose nous manque et que nous le désirons ardemment. Alors nous avons le sentiment que l’obtenir nous rendrait heureux. Mais nous savons aussi que ce bonheur serait de courte durée et que la satisfaction de ce désir particulier ne mettra pas fin à notre quête du bonheur.

 

Est-ce à dire que nous ne savons pas ce qui nous rendrait heureux. Nous sommes dans l’incapacité de déterminer objectivement ce qui nous rend heureux et de déterminer ce qu’il faut faire pour être heureux. Pourquoi ? Parce que le bonheur est un idéal de l’imagination nous dit Kant, c'est-à-dire une construction imaginaire allant chercher, dans l’expérience que nous avons, tout un ensemble d’éléments et tentant de les faire tenir ensemble, même si cela n’est finalement pas possible. Le concept du bonheur est indéterminé, donc aucun impératif ne peut objectivement me dire ce qu’il faut faire de manière certaine pour être heureux. La raison n’est donc guère utile à notre bonheur.

 

Le bonheur : une quête universelle.

 

« Tous les hommes aspirent naturellement au bonheur »

(Aristote, Ethique à Nicomaque).

 

La recherche du bonheur est une fin pour ainsi dire naturelle de nos actions. Comme tout être vivant, l’homme recherche le plaisir et fuit la douleur. Chaque action humaine possède une fin : la médecine recherche la santé. On peut considérer au-dessus de ces fins particulières des fins plus générales qui les subordonnent, comme le confort général du corps, la satisfaction des aspirations intellectuelles, etc. Au sommet de toutes les fins, est le bonheur comme Souverain Bien. Selon cette approche, nous pouvons donc définir le bonheur comme un étant de satisfaction et de contentement complet, tel que toutes les fins envisageables pour nos actions soient déjà atteintes.

 

La vision du Christianisme

 

Avec le Christianisme, le bonheur passe au second plan : c’est le rachat qui est prioritaire. Petit historique : Dieu créa le monde. Puis il créa les premiers hommes, Adam et Eve. Adam et Eve vivaient heureux dans le paradis terrestre, l’Eden. La seule interdiction de Dieu : ne pas manger la pomme du pommier qui symbolise l’art de la connaissance. Incitée par Satan, le serpent, le diable, Eve tente Adam qui mange la pomme. Par ce geste, il rivalise avec Dieu. C’est ce que le christianisme appelle le péché originel. Dieu les punit. Dorénavant, s’ils veulent de nouveau être heureux, retrouver le paradis, ils devront respecter trois ordres :

 

Pour Adam : « tu travailleras à la sueur de ton front », la vie deviendra un dur labeur, une lutte,

Pour Eve : « tu enfanteras dans la douleur »,

 pratiquer et suivre les 10 commandements.

 

Ainsi la vie d’un chrétien se résume à une vie de rachat s’il veut après sa mort retrouver le paradis perdu. Le bonheur ne peut pas être ressenti sur terre. Cette position est fondamentalement différente des Antiques, où le bonheur est possible dans notre vie, ici et  maintenant.

 

Dans la religion chrétienne, la notion de culpabilité est primordiale. Les hommes portent et supportent les conséquences du péché originel commis par Adam et Eve.

 

 

2 – Le bonheur dans l'Antiquité

 

Le bonheur comme accomplissement ou réalisation de soi.

 

Nous l’avons vu, la recherche du bonheur nous concerne tous. Mais si cette réussite doit toucher tout homme en tant qu’homme, en quoi consiste-t-elle ? On parviendrait sans doute à la dire plus clairement « si on déterminait la fonction de l’homme ». Aristote entend par « fonction » d’un être sa tâche propre, celle qui laquelle il est fait et qui le définit. La réussite de l’homme, pour Aristote, est de l’ordre d’une réalisation : celle des fonctions qui lui sont le plus spécifique, par où il accomplira au mieux sa « tâche » d’homme. L’ultime caractère du bonheur de l’homme, c’est donc d’accomplir ce qui est le plus conforme à son essence. C’est l’idée d’une réalisation de soi, d’une actualisation permanente de ce qui se trouve en puissante dans sa nature afin d’atteindra un point de perfection. Si le bonheur est une fin parfaite, c’est parce qu’il est supposé réaliser la perfection même de notre être.

 

Pour cela, il s’agit d’accorder l’activité de l’âme avec la vertu. La notion de vertu dépasse largement la sphère de la morale. Le vertueux est celui qui est le meilleur dans son genre, celui qui accomplit le plus pleinement le type d’être qu’il est. Exemple : le meilleur sportif. Le bonheur, défini par la fonction propre de l’homme, apparaît donc comme le couronnement d’un certain genre de vie menée en accord avec la vertu. Selon Aristote, la vertu est l’aptitude à la vie raisonnable qui s’éloigne des passions.

 

A propos de la Vertu

 

Vertu : ensemble des dispositions permettant une vie bonne. Les Antiques considèrent qu’il y a quatre vertus fondamentales qu’ils appellent vertus cardinales :

 

La sagesse est une vertu provenant de la connaissance et cette connaissance implique une vie correcte. Connaissance et bonheur sont liés chez les Antiques.

 

La tempérance est le sens de la mesure impliquant la maîtrise de soi notamment au niveau des passions. Par exemple, chez Platon, on doit maîtriser le désir sexuel pour se rapprocher étape par étape du monde intelligible (voir cours sur le désir).

La prudence consiste à penser les conséquences de ses actes et donc à ne pas agir n’importe comment.

La justice consiste à attribuer à chacun une place correcte (cf. Platon, la cité idéale : le marchand, le guerrier le roi)

 

Le sage sera celui qui agira en fonction de ces quatre vertus et sera ainsi heureux.

 

Quelle est la place du plaisir ? Le plaisir est en quelque sorte le couronnement de l’acte bon achevé. C’est cette notion d’achèvement qui permet de situer la place du plaisir dans le bonheur. C’est un effet de couronnement d’une activité accomplie.

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