Le langage

 

 

Le langage est une fonction universelle chez tous les hommes et une spécificité humaine dont la fonction essentielle est de communiquer. A première vue, le langage serait donc un instrument, un fait culturel, mais à y regarder de plus près « le langage est dans la nature de l’homme qui ne l’a pas fabriqué ». (Emile Benvéniste, Problèmes de linguistique générale).

 

Comment expliquer cette faculté du langage chez l’homme ? Elle reste encore aujourd’hui énigmatique. Une étude américaine publiée en 1999 dans la Revue de la National Academy of science situe la capacité de l’homme à parler il y a 300 000 ans. Pourquoi ? Les chercheurs ont identifié les facteurs suivants :

 

. la descente du larynx qui permet la résonance des sons,

. une nouvelle structure du cerveau,

. l’apparition de l’outil qui encourage le développement d’une pensée abstraite,

. le regroupement des être humains qui instaure des rapports sociaux basés sur des codes qu’il est nécessaire de mettre au point.

 

Quelles sont les autres hypothèses ?

 

Dans le Cratyle, Platon met en scène deux personnages qui s’opposent. Cratyle pense que les mots expriment la véritable nature des choses alors qu’Hermonège ne voit en eux que des signes conventionnels qui rendent possibles la communication. Le langage serait donc soit ce qui nous permettrait d’accéder à la nature des choses, soit un outil d’origine culturelle et les mots qui nous employons ne disent rien des choses qu’ils représentent.

 

Jean-Jacques Rousseau pense que l’origine des langues n’est pas due aux premiers besoins des hommes mais à la nécessité de se défendre. Le premier langage de l’homme serait un cri, un cri d’effroi, de joie ou d’appel au secours. Par la suite, les rapports entre les hommes seraient devenus plus complexes, les idées plus nombreuses, le langage plus varié et nuancé. La pensée s’est extériorisée grâce au langage.

 

Platon et Rousseau sont d’accord pour dire que le langage est né pour répondre au besoin d’échanger. Echanger, c’est mettre en commun, communiquer, exprimer. Le langage (paroles et gestes) est l’expression d’une pensée.

 

 

Qu’est-ce que le langage ?

 

Nous pouvons définir le langage comme un système de signes permettant une communication entre les hommes. Le langage est un système linguistique propre à l’homme. La langue est un outil culturel propre à une communauté. La parole est l’utilisation singulière d’une langue par une personne donnée. Elle est une production et un acte individuels.

 

Langue et parole sont interdépendantes. La parole est la production verbale d’un individu mais elle renvoie à la langue, c'est-à-dire à un système de règles qui permet à une communauté de s’étendre. De son côté, comme le montre le linguiste Ferdinand de Saussure, la langue présuppose la parole. Historiquement, la parole est nécessaire pour que la langue s’établisse. C’est aussi en entendant les autres parler que nous apprenons notre langue maternelle. Enfin, c’est la parole qui fait évoluer la langue. Il y a donc, dit Saussure, « interdépendance entre la langue et la parole ; celle-là est à la fois l’instrument et le produit de celle-ci ». (Cours de linguistique générale).

 

Le langage n’appartient-il qu’à l’homme ?

 

Pour Descartes, le langage est une spécificité humaine car l’homme parle et utilise des signes pour communiquer sa pensée. Pour cela, il doit les apprendre. Ces signes sont d’une autre nature que les cris innés et codifiés des animaux. Les sourds-muets sont un excellent exemple car ils parviennent à communiquer sur des bases différentes. Pour Descartes, l’homme peut penser sans parler mais il ne peut pas parler sans penser. Le langage humain naît dans une intention et se déploie dans l’imagination et la créativité.

 

Emile Benvéniste, linguiste français, réfute l’hypothèse que les animaux posséderaient un langage. Pour lui, les animaux utilisent un code de signaux. Leur communication est stéréotypée (le signal a toujours la même signification), héréditaire (le signal est inné, transmis génétiquement) et ne permet pas l’échange et le dialogue. Ceci est à nuancer aujourd’hui car des études scientifiques ont montré que certains animaux « inventent », « échangent » entre eux, « communiquent » avec l’homme et sont capables d’initiatives. S’ils ne parlent pas le langage « humain », il n’est plus possible d’affirmer qu’ils ne pensent pas (dauphins, grands singes, etc.).

 

Nous avons vu que le langage est né de l’instauration de rapports sociaux. Le langage constitue donc à ce titre le premier élément de la culture. Pour Claude Lévi-Strauss, le langage est un « fait culturel par excellence » puisqu’il est un élément que l’homme a ajouté à son état de nature. En effet, le langage nécessite un apprentissage. Il n’est pas transmis biologiquement. Il est le produit d’un héritage culturel et est donc à ce titre un moyen privilégié d’assimilation de la culture. Les règles du groupe reposent sur des mots.

 

Le langage est le système culturel qui permet d’apprendre d’autres systèmes : l’art, la religion, le droit, le travail ne sont compréhensibles que par la médiation de la langue. Etre exclu du langage, de la langue, c’est s’exposer au silence, à la marginalisation voire à l’exclusion et à la violence.

 

Le langage humain est le fruit d’une histoire. Il véhicule du sens et des valeurs. « Nous pensons un univers que notre langue a d’abord modelé ». écrit Benvéniste.

 

Mais le langage permet-il d’exprimer toute la pensée ?

 

Le langage permet d’accéder à la faculté de comprendre le réel, de symboliser, d’établir des relations de significations entre des réalités différentes. La parole et la pensée créent du sens et permettent de se construire en tant qu’être intime et social.

 

Nous avons vu que le langage permet à l’homme d’énoncer sa pensée. Mais il est possible de comprendre sans la parole et de parler sans comprendre. Quels sont les rapports entre langage et pensée. Les opinions divergent.

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